Le rôle des associations dans l’économie française, et dans le fonctionnement de la société, est souvent méconnu. Le secteur associatif est pourvoyeur d’emplois (notamment depuis la professionnalisation des associations dans les années 2000) et joue un rôle crucial dans de nombreux domaines.
“Les associations sont des entreprises comme les autres” : si cette petite phrase peut heurter certains militants, c’est une réalité aujourd’hui ; les associations relèvent du secteur privé, elles sont assujetties au droit du travail, elles doivent suivre des règles de gestion et rendre des comptes sur leurs activités, …
Pour autant, elles ont quelques spécificités qu’il est nécessaire de prendre en compte lors d’un accompagnement RH, afin que celui-ci ait un impact concret sur la performance économique et sociale de ces structures et qu'elles en tirent un maximum de bénéfices.
Qu'est-ce qu'une association ?
" l’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices."
⚖️Dès le premier article de cette loi, le législateur fait connaître sa volonté d’inscrire le régime juridique des associations dans l’esprit et les principes de droit commun des contrats régis par le code civil.
Les associations en quelques chiffres
La France compte 1,5 million d’associations en activité.
Les financements privés représentent plus de la moitié du budget des associations.
🫶90% des associations ne fonctionnent que grâce aux bénévoles, elles en mobilisent près de 12,5 millions. On observe un engagement croissant des jeunes, un repli de leurs aînés, une faible participation des moins diplômés et des actions ponctuelles qui prennent le pas sur le bénévolat régulier.
En 2023, les associations accueillaient 144.000 volontaires en service civique, qui participent à la mise en oeuvre de leur projet associatif.
1,86 million de salariés sont employés par 153.000 associations (la masse salariale s’élève à 46,5 milliards d’euros).
👩Le secteur associatif emploie 71% de femmes.
⏭️ 45% des salariés des associations (emploi principal) sont en CDI. 41 % sont en CDD, soit deux fois plus que l’ensemble des salariés tous secteurs confondus.
⌛33% des contrats correspondent à un temps partiel.
💸[En 2020] Le salaire annuel moyen brut des salariés associatifs est de 23 680 euros (contre 30.060€ tous secteurs confondus - INSEE 2020)
Les secteurs d’activité dans lesquels les associations interviennent
Les spécificités des associations par rapport aux entreprises
Il convient de bien appréhender les spécificités des associations pour pouvoir leur proposer un accompagnement RH adapté et pertinent 🔎 :
🪐l’importance et l’impact de leur écosystème sur leur structuration et leur développement,
🌌leur hétéroclicité et leur nombre très important qui rendent impossible une solution / approche unique,
👑une gouvernance partagée, imbriquant des administrateurs bénévoles et des salariés, pouvant générer un manque de clarté sur les missions et responsabilités,
🤝la place prépondérante des relations informelles conduisant à peu de formalisme,
💥des difficultés à prévenir et gérer les conflits dans des environnements où l'affect tient une grande place,
🦑une grande polyvalence des salariés, impliquant flexibilité et adaptabilité, et une charge de travail parfois très conséquente faute d'avoir les moyens d'embaucher,
🪛un manque de moyens et de compétences un peu pointues sur certaines fonctions support, notamment RH,
💟 les valeurs et l'engagement personnel revêtent une grande importance,
💭une faible représentation du personnel et une culture du dialogue social peu développée,
🥽une gestion "court-termiste" faute de moyens et/ou de visibilité, ou d'actualisation du modèle économique
🧮 une recherche de financements permanente, très consommatrice de temps,
☔une plus grande vulnérabilité aux aléas économiques ou politiques,
🧲des difficultés de recrutement et d’attractivité, liées aux difficultés à proposer des contrats pérennes ou des salaires alignés au marché,
. . .
Impact des spécificités des associations sur leur gestion RH
Un fonctionnement contraint qui complexifie la gestion RH
Dans les associations plus d'ailleurs (de mon point de vue), on se confronte à des difficultés systémiques.
Voici un des scénarios que je rencontre fréquemment :
♾️les financements sont insuffisants mais le projet doit être mis en oeuvre, notamment parce qu'il y a des engagements à tenir vis-à-vis des bénéficiaires, des partenaires institutionnels et financiers, ...
♾️la structure ne peut pas embaucher le niveau de compétences dont elle a réellement besoin (faute de pouvoir le rémunérer à sa juste valeur),
♾️elle va donc recruter un profil plus junior, qu'il faudra accompagner,
♾️ce qu'elle ne peut pas faire, puisque le temps est compressé, que tout le monde est occupé à 150%, qu'il n'y a pas toujours les compétences managériales disponibles, ...
♾️notre salarié junior va donc essayer de compenser en travaillant plus, mais ses heures supplémentaires ne pourront pas lui être payées,
♾️il va finir pas s'épuiser au travail, se désengager, s'abîmer la santé ou quitter la structure,
♾️la structure devra de nouveau recruter,
♾️ . . .
Cet enchaînement (que je vois dans nombre d'associations) a les conséquences RH suivantes :
⚠️recrudescence des risques psychosociaux
⚠️non conformité au droit du travail (gestion du temps de travail, règlement des heures supplémentaires, prévention des risques professionnels,...)
⚠️détérioration du climat social
⚠️atteinte à la notoriété de la structure
⚠️ explosion du temps consacré au recrutement, à l'intégration, à la formation
Il faut arriver à détricoter tous les fils qui génèrent ces situations, à planifier les actions correctives sur du moyen/ long terme, à identifier des ressources à mobiliser, . . . pour pouvoir sortir de cette spirale.
Une gestion surtout administrative et souvent déléguée à un tiers
Souvent, dans les associations de moins de 20 salariés, il n'y a pas d’expertise interne dédiée aux RH et la gestion administrative RH est souvent déléguée ou “supervisée” par le cabinet d’expertise comptable, qui est un interlocuteur privilégié des associations.
Le souci, c’est que le cabinet d’expertise comptable :
n’est pas sur place au quotidien (la structure ne l’interroge donc que sur ce qu’elle est elle-même en capacité d’identifier),
n’a lui-même pas toujours l’ensemble des compétences juridiques en matière de droit du travail ou en management RH (ne parlons pas de la Qualité de Vie et des Conditions de Travail ou des questions de santé et sécurité),
voire que sa lettre de mission évoque un “accompagnement social”, sans plus de précisions; ce qui laisse penser au dirigeant associatif que ces questions-là sont gérées par son Expert-Comptable . . . alors que pas forcément !
Entendons-nous bien, l’idée n’est pas ici de jeter la pierre aux cabinets d’expertise comptable qui sont des interlocuteurs de qualité et de proximité, mais chacun son métier . . . Certains l’ont bien compris et embauchent des DRH externalisés, qu’ils mettent à disposition de leurs clients pour approfondir davantage les sujets RH.
L'importance de la vision du dirigeant associatif
Ce que nous constatons également c’est que la place des RH et les pratiques managériales sont très dépendantes de la vision / culture du dirigeant associatif et de sa sensibilité aux sujets y sont rattachés.
Trop souvent encore, les RH signifient "gestion administrative du personnel”. Or, en 2024 . . . ça ne suffit plus !
La difficulté à répondre aux attentes des salariés
Les salariés ont des attentes et des besoins auxquels les associations doivent pouvoir répondre.
Parmi ceux qui sont le plus souvent exprimés :
que le droit du travail soit respecté (!),
que le management se professionnalise,
de pouvoir développer des compétences,
d’avoir un dialogue social structuré qui ne repose pas uniquement sur l’affect,
d’avoir un équilibre entre vie professionnelle et vie privée,
. . .
Comment adapter l’accompagnement RH aux spécificités des associations ?
Les critères de qualité d'un accompagnement RH
Un accompagnement RH de qualité doit, de mon point de vue :
intégrer le cadre régissant le fonctionnement associatif,
identifier les dispositifs complémentaires à mobiliser en fonction des sujets, connaître l'écosystème associatif
prendre en compte les moyens (humains, financiers) de la structure accompagnée et avoir une approche très pragmatique,
s’adapter au rythme et à la temporalité pour ne pas mettre des équipes en surcharge et décourager,
être sur-mesure : les solutions toute faites et leur duplication ne fonctionnent pas, les structures sont trop hétérogènes (structuration, moyens, enjeux, écosystème, culture, …),
intégrer la complexité liée à la gouvernance partagée,
associer l’ensemble des parties prenantes pour que cela ne repose pas sur une seule personne qui ne pourra pas tenir seule les sujets sur la durée,
permettre aux parties prenantes de s’approprier pleinement les enjeux,
permettre la montée en compétences et développer l’autonomie, car la structure n’aura pas les moyens d’avoir un recours à un prestataire externe,
sensibiliser à l’importance de la formalisation (des outils, des process, …) en prenant garde à ne pas (trop) rigidifier pour ne pas détruire ce qui fonctionne,
doit parfois bousculer pour faire prendre conscience de certaines choses,
. . .
Le profil de l'intervenant RH
L’intervenant en association est un expert qui endosse parfois le rôle de guide, parfois le rôle de coach, parfois le rôle d’arbitre, parfois le rôle de médiateur.
Une connaissance fine du secteur associatif, et notamment des modes de relation et de communication, est vraiment un plus (j'ai connu de bons consultants qui étaient complètement déboussolés face à ce qu'ils découvraient en association).
Il ou elle doit savoir transmettre et progressivement se retirer.
Il ou elle doit avoir conscience que le temps investi par l’association est précieux compte tenu de ses moyens et qu’il est important que cela aboutisse à des améliorations concrètes. Pour autant, une partie du résultat dépend de la structure. Il faut donc savoir aussi accepter d’avoir parfois un effet limité.
Ressources
🔖 AVISE : Centre national de compétences de l’innovation sociale pour la France en Europe
🔖Dispositif local d'accompagnement (DLA) : accompagnement personnalisé pour les associations employeuses
🔖 IMPACT EMPLOI (URSSAF)
🔖 INJEP : observatoire de la jeunesse, du sport, de la vie associative et de l'éducation populaire
🔖 Le Compte Asso : site officiel de gestion des associations
🔖 Le Mouvement associatif : réseau d'accompagnement et de représentation des associations.
🔖 OPCO
Conclusion
Le secteur associatif est riche de diversité et de projets porteurs de sens. On peut y grandir professionnellement en accéléré du fait des responsabilités confiées.
Cependant, la beauté du projet et les valeurs affichées ne sont pas toujours synonymes de Qualité de Vie et des Conditions de Travail (#QVCT).
Il est essentiel que les associations professionnalisent leurs pratiques RH, développent une véritable approche en matière de management des ressources humaines, d’accompagnement des parcours professionnels, de démarche Qualité de Vie et des Conditions de Travail, de prévention des risques professionnels, de marque employeur (pour faire savoir à quel point ce qu’elles font est chouette), . . . pour pouvoir attirer et fidéliser les profils dont elles ont besoin.
POUR ALLER PLUS LOIN
👉J'interviens quasi exclusivement au sein de petites et moyennes organisations, dont une grande partie est rattachée à l'Economie Sociale et Solidaire
👉Je réalise des diagnostics de la fonction RH afin de donner aux dirigeants une vision globale des enjeux, des risques et des leviers et je les accompagne pour faire évoluer leurs pratiques, en fonction des priorités pour la structure.
👉 Je suis référencée auprès de différents OPCO et du DLA afin que ces accompagnements puissent bénéficier d'une prise en charge financière
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